Thaïlande : bras de fer entre Facebook et le gouvernement au sujet d’un groupe sur le thème de la monarchie


Le géant américain des réseaux sociaux Facebook a annoncé mardi qu’il prévoyait d’entamer une action en justice contre le gouvernement thaïlandais, après avoir été « contraint » d’interdire l’accès en Thaïlande à un groupe d’un million de membres sur le thème de la monarchie.

Facebook avait bloqué la consultation de « Royalist Marketplace » lundi, après que les autorités thaïlandaises ont menacé la société de poursuites judiciaires, si certains contenus jugés diffamatoires envers la monarchie n’étaient pas retirés.

« Des demandes comme celle-ci sont sévères, contreviennent aux droits de l’Homme internationaux et ont un effet néfaste sur la capacité de la population à s’exprimer », a déclaré un porte-parole de Facebook à Reuters.

« Nous travaillons pour protéger et défendre les droits de tous les internautes et nous nous préparons à contester juridiquement cette demande. »

Ce commentaire ne comporte néanmoins aucun détail sur la contestation judiciaire.

Cette décision intervient dans un contexte de manifestations quasi quotidiennes de la jeunesse thaïlandaise contre son gouvernement — mené par l’ancien chef de la junte militaire Prayut Chan-o-cha — et d’appels sans précédent à des réformes de la monarchie.

Le groupe « Royalist Marketplace » fut créé en avril par Pavin Chachavalpongpun, un universitaire et critique de la monarchie en exil depuis le coup d’État de 2014.

Lundi soir, la page du groupe affichait un message : « L’accès à ce groupe a été restreint en Thaïlande après une demande légale du ministère de l’Économie et de la Société numérique. »

Pavin, qui vit au Japon, estime que Facebook a cédé aux pressions du gouvernement militaire.



Le Premier ministre Prayut entend résister aux poursuites de Facebook

Le Premier ministre thaïlandais, Prayut Chan-o-cha, a de son côté déclaré mardi que son administration se tenait prête à affronter Facebook devant les tribunaux. Il rejette ainsi les accusations du géant des réseaux sociaux selon lesquelles il aurait abusé d’un pouvoir dictatorial pour bloquer l’accès à ce groupe.

Il ajoute que cette pièce possède deux faces, dont l’une représente la loi thaïlandaise, que chacun dans le pays doit respecter. Et précise que son gouvernement ne s’est jamais ingéré dans les affaires intérieures d’autres États.

« Je n’ai pas besoin de citer de noms ou de savoir s’ils nous poursuivent en justice. Ils appartiennent au même groupe, appelé “Royalist Marketplace”, avec Somsak (Jeamteerasakul) et Pavin (Chachavalpongpun) comme force motrice », soutient le Premier ministre.

Il maintient que l’action contre la page « Royalist Marketplace » est conforme à la loi thaïlandaise et à une ordonnance judiciaire.

« Je n’ai jamais utilisé de pouvoir dictatorial parce que je n’ai plus ce pouvoir », affirme le Premier ministre. Ce dernier insiste sur le fait que le gouvernement a demandé à la justice l’autorisation de bloquer l’accès à cette page.

Parallèlement, le vice-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères, Don Pramudwinai, a déclaré que l’exécutif pouvait se prévaloir de la législation thaïlandaise pour modifier tout contenu qui violerait le droit.

« La liberté en vertu des lois internationales est une autre affaire. Qu’elle puisse s’appliquer ou non à ce qui se passe en Thaïlande dépend de la qualité des sites concernés, qu’ils présentent ou non ce qui est bénéfique pour le peuple et la société thaïlandaise. Sinon, ils causent des problèmes », estime-t-il.

M. Pavin a quant à lui déjà lancé un nouveau groupe Facebook au nom similaire qui a rassemblé plus d’un demi-million de membres en une seule journée. « Si vous voulez le fermer à nouveau, alors je créerai un autre groupe. Pour promouvoir la liberté d’expression, je le ferais », déclare M. Pavin.

Par ailleurs, un collectif qui se présente comme œuvrant pour « la nation, la religion et la monarchie » a remis mardi à l’ambassade du Japon une lettre qui demande au gouvernement japonais de mettre fin aux activités de M. Pavin et de l’expulser vers la Thaïlande afin qu’il soit traduit en justice.