Des centaines de manifestants thaïlandais se sont réunis à Bangkok mercredi (10 février 2021) pour demander la libération de quatre militants, placés en détention provisoire la veille dans l’attente de leur procès pour lèse-majesté, un crime passible de 15 ans de prison.
S’inspirant des événements de protestation en cours au Myanmar (ex-Birmanie) voisin, contre le coup d’État de la semaine dernière, de nombreux participants ont tapé sur des casseroles et des poêles. D’autres ont également brandi des drapeaux du Myanmar pour exprimer leur soutien au mouvement prodémocratie de ce pays.
Initialement, cette manifestation était donc organisée en signe de solidarité avec les opposants à la junte militaire birmane. Néanmoins, elle s’est rapidement muée en appel à la modification ou à l’abrogation de la stricte loi de lèse-majesté après l’arrestation de quatre militants mardi.
De brefs affrontements entre des policiers en tenue antiémeutes et des manifestants ont eu lieu lorsque ces derniers se sont approchés d’un commissariat. Du gaz lacrymogène aurait également été utilisé.
Panusaya « Rung » Sithijirawattanakul, l’une des leaders du mouvement initié l’année passée, a déclaré : « Si nous sortons dans la rue par centaines de milliers, nous pouvons réformer la monarchie ».
Depuis des mois, les rassemblements, menés par des jeunes et des étudiants, ont brisé plusieurs tabous traditionnels en Thaïlande, en appelant ouvertement à changer en profondeur la puissante institution royale. Le refus de la mise en liberté sous caution des quatre leaders, poursuivis pour insultes à la monarchie, a aussi exacerbé leur colère hier.
À la tombée de la nuit, près d’un millier de manifestants étaient rassemblés. Certains brandissaient des pancartes « libérez nos amis » et « abolition du 112 », en référence à l’article du Code pénal qui réprime les insultes envers la royauté.
Un peu plus tôt dans la journée, 44 législateurs de l’opposition avaient également soumis une proposition de modification de ce texte.
Les leaders du mouvement ont affirmé que le rassemblement d’hier constituait la reprise des manifestations qui secouent le pays depuis l’année dernière. Elles avaient été interrompues par une seconde vague de coronavirus Covid-19 qui a multiplié par cinq le total de cas en Thaïlande depuis la mi-décembre.
« Aujourd’hui, il s’agit du premier rassemblement, d’une séance d’ouverture et d’une bataille après qu’un système injuste a emprisonné nos amis », a déclaré Panupong Jadnok, un autre leader.
Il ajoute que les événements au Myanmar doivent inspirer le mouvement thaïlandais.
Les participants ont par ailleurs réitéré leurs trois revendications de l’année dernière : destitution du Premier ministre Prayut Chan-o-cha, révision de la Constitution élaborée par l’armée et réforme de la monarchie.
Le Premier ministre Prayut, qui est initialement arrivé au pouvoir après un coup militaire d’État en 2014, a pour sa part estimé que le retour des protestations nuirait à la Thaïlande.
« Est-ce que c’est approprié ? Si ça ne l’est pas, alors ne les soutenez pas. Nous n’en avons pas eu assez en Thaïlande ? », a-t-il lancé.