La Thaïlande cherche à relancer son tourisme malgré l’envolée du baht

La Chine représente plus de 25 % des arrivées de touristes - Le baht thaïlandais a augmenté de 6,7 % face au dollar - La Thaïlande reçoit près de 40 millions de touristes par an

La Thaïlande cherche à relancer son tourisme malgré l’envolée du baht

Alors que l’industrie du tourisme en Thaïlande doit faire face aux défis causés par la hausse du baht, le pays cherche à attirer une clientèle de nouveaux voyageurs. En effet, ces derniers seraient plus enclins à consommer que les visiteurs réguliers.

« Les nouveaux visiteurs dépensent de 10 à 20 % de plus que ceux réguliers. Et dans le même temps, nous pouvons nous constituer une clientèle inédite », a déclaré Yuthasak Supasorn, gouverneur de l’Office du tourisme de Thaïlande (TAT).

Tout au long de l’année 2019, le secteur a tourné au ralenti. La devise thaïlandaise, le baht, a augmenté de 6,7 % par rapport au dollar et le pays constitue donc désormais une destination de voyage coûteuse.

Le TAT, une agence d’État, cherche à porter le nombre de nouveaux visiteurs à plus de 10 millions en 2020, soit 25 % du total, contre 10 % aujourd’hui. Pour ce faire, les autorités ont concentré leurs efforts marketing sur l’Asie centrale, l’Europe de l’Est et l’Amérique latine.

En outre, l’organisation souhaite que le nombre d’arrivées s’élève à 41,8 millions l’année prochaine. Il s’agirait d’un record, en hausse de quelque 5 % par rapport à 2019. Quant au chiffre d’affaires, il pourrait atteindre 2 220 milliards de bahts (66,8 milliards d’euros).

Le tourisme demeure une activité cruciale pour l’économie thaïlandaise. Un peu plus tôt cette année, le Conseil national du développement économique et social avait ainsi indiqué qu’il comptait pour 18,4 % du produit intérieur brut (PIB).

Mais le secteur a subi un coup d’arrêt en 2019. En effet, au deuxième trimestre, le pays a accueilli 8,97 millions de visiteurs, soit une hausse modeste de 1,43 % seulement en glissement annuel.

Malgré tout, la Thaïlande demeure l’un des pôles touristiques les plus populaires à travers le monde.

Les Chinois, le moteur du tourisme en Thaïlande

Ainsi, entre 2003 et 2018, le nombre d’arrivées de voyageurs a grimpé en flèche pour passer de 10,08 à 38,28 millions. Et ce, en dépit de multiples événements perturbateurs : un tsunami, une crise économique mondiale, des inondations fréquentes, des troubles civils, deux coups d’État militaires, etc.

Sans surprise, la Chine constitue la principale force motrice du secteur. En 2018, 10,54 millions de Chinois ont visité la Thaïlande, c’est-à-dire 27,5 % du total des étrangers. Dans ces conditions, tout éventuel refroidissement de l’économie chinoise est susceptible de porter préjudice au tourisme du Royaume.

L’envolée de la devise thaïlandaise a elle aussi eu des répercussions négatives sur les sites les plus populaires, comme sur l’île de Phuket, dans le sud.

Même si Phuket a enregistré une hausse de 4 % du nombre de visiteurs cette année, les revenus dégagés ont chuté, a rapporté la Faculté d’hôtellerie et de tourisme de l’Université du Prince de Songkla.

« L’économie de Phuket est en pleine mutation. La croissance annuelle dans la province a été de 6 % au cours des deux dernières décennies, mais récemment, nous avons observé des perturbations », a déclaré Chayanon Phucharoen, vice-doyen de la recherche et des études supérieures à la Faculté.

M. Chayanon a blâmé le baht, mais aussi les plages dégradées et la sécurité routière déficiente à Phuket.

« Le secteur peut être amélioré de bien des façons, par exemple en offrant aux visiteurs des possibilités inédites telles que des activités culturelles », a-t-il ajouté.

Damrongkiat Pinitkarn, secrétaire de l’Association de l’industrie du divertissement et du tourisme de Pattaya, a expliqué que la hausse du baht avait modifié les habitudes des vacanciers.

« Le soir, de plus en plus de touristes restent à l’intérieur de leurs hôtels au lieu de s’aventurer pour faire la fête dans les discothèques ou les bars. »

(Photo : Azchael / Wikimedia)

Les Indiens, la nouvelle cible

De même, dans le nord, les perspectives se révèlent plutôt maussades.

« Les réservations sont en baisse et les anticipations pour le premier trimestre 2020 semblent effrayantes », a lancé La-iat Bungsrithong, responsable de l’Association des hôteliers du nord, basée à Chiang Mai. « Par rapport à l’année dernière, le tourisme est en recul et il semble y avoir peu de perspectives positives à l’horizon. Les visiteurs chinois restent le pilier du nord grâce aux vols directs en provenance des villes [chinoises]. »

Mme La-iat a également souligné qu’en raison de l’augmentation du nombre de chambres d’hôtel ces dernières années, les exploitants ont été confrontés à des taux d’occupation plus faibles.

Dans un élan qui vise à attirer plus de voyageurs du grand rival de la Chine, le TAT a annoncé des visas à l’arrivée gratuits pour les Indiens jusqu’en avril 2020. L’organisation a également conclu un partenariat avec MasterCard afin de faciliter les paiements numériques pour les touristes venus d’Inde.

Manasi Narasimhan, vice-président du marketing et des communications de MasterCard pour l’Asie du Sud, a indiqué que « plus d’un million de terminaux de paiement numérique en Thaïlande rendent le pays encore plus hospitalier pour les touristes qui veulent un voyage sûr et pratique sans argent liquide ».

Pour 2019, les autorités de Bangkok projettent que 2 millions de visiteurs indiens auront été accueillis dans le pays, contre 1,6 million un an plus tôt.

Se renouveler

« Nous cherchons à accroître nos efforts afin de faire de la Thaïlande un lieu plus attrayant pour les mariages indiens », a quant à lui déclaré Chattan Kunjara Na Ayudhya, gouverneur adjoint pour le marketing international du TAT.

Il a ainsi rappelé que la Thaïlande avait déjà accueilli près de 400 mariages indiens. De plus, il souhaite que davantage de familles indiennes visitent la Thaïlande, en particulier les provinces plus petites et moins connues.

« Les dépenses des touristes dans les villes dites secondaires ne représentent que 10 % des revenus. Nous voulons changer cela », a-t-il affirmé. « Quels que soient les événements ou les bouleversements qui se produisent en Inde ou en Thaïlande, nous comptons toujours des Indiens qui visitent le pays. Nous n’avons pas observé de baisse pendant ces périodes. La confiance accordée au marché indien est élevée ».

Imtiaz Muqbil, journaliste spécialisé dans les voyages et expert en tourisme asiatique, a avancé l’idée que le principal problème de cette industrie en Thaïlande pourrait être son vieillissement et la nécessité d’une nouvelle approche.

« Ces dernières années, la Thaïlande a été frappée par toutes sortes de catastrophes, mais son bilan touristique a connu une croissance exponentielle. C’est ce qui, selon moi, fait de la Thaïlande la plus grande histoire du tourisme ».

M. Muqbil a toutefois mis en garde contre le fait que l’industrie du voyage en Thaïlande était en train de mûrir et avait besoin d’un « bilan de santé complet ».

Il a suggéré que le secteur laisse de côté la croissance et les chiffres annuels et se concentre davantage sur la pérennité afin de protéger l’environnement.

« Le tourisme est une industrie en plein essor à l’échelle mondiale. C’est la seule qui réponde à tous les objectifs de développement durable des Nations Unies », a-t-il affirmé, cité. « La Thaïlande a une longueur d’avance dans ce domaine. »