Thaïlande : deux morceaux de rap animent la scène politique

La scène politique thaïlandaise s'est animée ces dernières semaines, après la sortie de deux morceaux de rap, contre et en faveur du Gouvernement militaire
La scène politique thaïlandaise s’est animée ces dernières semaines, après la sortie de deux morceaux de rap, contre et en faveur du Gouvernement militaire (Photo : Khaosod)

Une lutte musicale entre deux morceaux de rap, anti et pro Gouvernement, a fait s’échauffer le climat politique déjà sensible en Thaïlande, quelques mois avant que le pays ne se rende aux urnes.

Une chanson intitulée « Prathet Ku Mee » ou « Ce qu’a mon pays » par Rap Against Dictatorship s’attaque au pouvoir militaire actuel et à une foule de problèmes tels que la corruption endémique, les injustices et le climat politique violent et divisé en Thaïlande.

Depuis la sortie du titre le 22 octobre dernier, le clip a rapidement atteint plus de 30 millions de vues sur YouTube, et s’est classé en tête des classements dans le pays, au grand dam du pouvoir en place.

Les autorités ont adopté une position ferme à l’égard de la chanson, le responsable adjoint de la police thaïlandaise, le Général Srivara Rangsibragmanakul, qui était clairement irrité, a par exemple remis en question la légalité du morceau et son éventuelle incitation aux troubles, avant de se rétracter.

« Les paroles sont insuffisantes pour engager des poursuites, les gens sont donc autorisés à écouter, chanter et partager la chanson », a-t-il déclaré, alors que le titre avec ses textes hautement politiques a attiré un afflux de fans et de partisans.

Ce rap controversé est cependant une aubaine pour les groupes anti-militaires du pays, qui vantent les louanges du courage et de l’audace de ces rappeurs.


Le Gouvernement sort son propre rap, en réponse à « Prathet Ku Mee »

Parmi les paroles de la chanson qui ont mis à vif les nerfs des fonctionnaires du Gouvernement, on trouve : « Mon pays pointe une arme sur votre gorge. Il prétend être libre mais ne donne pas le droit de choisir. »

« Mon pays a une panthère noire abattue par un fusil. Mon pays prêche la morale mais a un taux de criminalité plus élevé que la Tour Eiffel », et « C’est un pays où les juges vivent dans des villas construites dans un parc national et où le centre-ville est un champ de bataille ».

À la fin du clip de cinq minutes, on peut lire le message suivant : « Diviser pour mieux régner est le meilleur tour d’un dictateur. Tout le peuple s’unit. »

Le clip, tourné en noir et blanc et interprété par 10 rappeurs, aborde également un autre sujet politiquement tabou, car il semble recréer une scène du massacre de 1976 devant l’Université Thammasat de Bangkok.

Pour contrer la chanson « Prathet Ku Mee », le Gouvernement a dévoilé son propre morceau de rap, « Thailand 4.0 », lors d’une conférence de travail réunissant le Premier Ministre, le Général Prayut Chan-o-cha, et plusieurs représentants gouvernementaux de premier plan.

Au 8 novembre, le titre qui adopte un ton plus positif avec des paroles telles que « Il y a beaucoup de Thaïlandais talentueux, si nous travaillons ensemble nous serons plus forts » et « Génération M, génération Z, peu importe la génération, si vous êtes tous d’accord, ce sera plus facile », ne compte que 3,5 millions de vues sur YouTube, et 58 000 « Je n’aime pas ».

Encore loin des 30 millions de vues et 963 000 « J’aime » atteints par « Prathet Ku Mee » sur YouTube.

Des médias et internautes locaux ont également critiqué cette initiative, qualifiant « Thailand 4.0 » de réponse maladroite au populaire « Prathet Ku Mee ».