Selon les analystes et les gestionnaires de fonds, la baisse du baht, la sous-performance des actions et la pression sur le marché obligataire témoignent de l’inquiétude grandissante des investisseurs internationaux face à l’instabilité politique et aux perspectives de croissance en Thaïlande, la deuxième économie d’Asie du Sud-Est.
Au cours du deuxième trimestre 2020, le PIB de la Thaïlande a souffert de sa plus forte contraction depuis au moins deux décennies. Parallèlement, la pandémie mondiale de coronavirus Covid-19 a frappé de plein fouet son industrie touristique et ses exportations, deux piliers de son activité économique.
De surcroît, le gouvernement est confronté à un mouvement de protestation des étudiants qui prend de l’ampleur et bouleverse sa ligne d’action. Vient s’ajouter à cela la démission surprise du ministre des Finances, Predee Daochai, mardi, après moins d’un mois à ce poste.
« Je pense qu’aucun autre pays ne rencontre ces deux ou trois problèmes en même temps, comme si la crise de la Covid-19 n’était pas assez grave », déclare Howie Lee, économiste à la Banque OCBC.
Prayut Chan-o-cha, le Premier ministre, a estimé que le départ de M. Predee — officiellement pour des raisons de santé — n’affecterait pas les perspectives économiques. Il n’a cependant fixé aucun calendrier pour la nomination d’un nouveau ministre.
Les investisseurs actifs ont déserté la Thaïlande
Conséquence de cette situation, le baht a subi une dépréciation et se trouve désormais au niveau où il s’échangeait en juin. Et ce, malgré la chute du billet vert au cours des derniers mois.
L’indice boursier de référence se révèle quant à lui en baisse de 17 % depuis le début de l’année, après avoir continuellement subi des sorties de capitaux internationaux, alors que les marchés asiatiques ont progressé de 5 %.
« Les seuls étrangers qui subsistent dans le marché thaïlandais des actions sont en réalité les investisseurs passifs, les fonds négociés en bourse et [ceux] qui suivent l’indice. Les gestionnaires actifs ont disparu », explique Jeep Chatikavanij, fondateur du fonds Ton Poh, évalué à 150 millions de dollars.
La Thaïlande a également été touchée plus durement que les autres pays par la cession des obligations d’État à long terme. Les investisseurs ont en effet peine à accepter les ventes de dettes considérables pour subventionner les dépenses du gouvernement.
L’élargissement des écarts de crédit pour les entreprises — puisque les financeurs exigent une majoration des taux d’intérêt pour les prêts aux sociétés thaïlandaises — témoigne également d’un risque de défaillance accru, selon Arup Raha, directeur du département ASEAN chez BNP Paribas.
« Avec une inflation globale négative depuis de longs mois, la croissance des revenus est faible. Cela provoque un sentiment de tension dans le monde des affaires. »