La Banque de Thaïlande a abaissé mercredi son taux directeur pour la première fois depuis plus de quatre ans, dans une tentative visant à relancer l’économie face aux risques croissants à l’échelle internationale.
Le Comité de la politique monétaire a voté à cinq voix contre deux en faveur d’une réduction d’un quart de point du taux directeur à 1,5 %, a annoncé la banque centrale. Cette décision a surpris les économistes qui ne s’attendaient en majorité à aucun changement.
La Banque de Thaïlande avait jusque-là fait preuve d’une certaine réticence aux baisses de taux, exprimant son inquiétude face à l’endettement élevé des ménages et aux risques pour la stabilité financière. Toutefois, les perspectives économiques se sont fortement détériorées au cours des derniers mois en raison de l’escalade des tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine, de l’aggravation de la sécheresse frappant le secteur agricole et de l’appréciation du baht, nuisant résolument aux exportations et au tourisme. La devise thaïlandaise a gagné près de 6 % par rapport au dollar cette année, soit la meilleure performance en Asie.
« La faiblesse des exportations et de la consommation intérieure va peser lourdement sur l’économie thaïlandaise cette année », a déclaré Prapas Tonpibulsak, directeur des investissements chez Talis Asset Management à Bangkok. « Nous nous attendons à d’autres baisses d’ici 2020, car elle doit continuer à assouplir sa politique monétaire pour la rendre plus efficace. »
Les banques centrales asiatiques ont tempéré leurs politiques pour stimuler la croissance et suivre le rythme de la Réserve fédérale américaine, cette dernière ayant réduit son taux directeur de 25 points de base la semaine dernière. La Nouvelle-Zélande et l’Inde ont également baissé leurs taux mercredi, dans les deux cas de façon plus importante que prévu.
De son côté, la Banque de Thaïlande a indiqué que l’économie devrait ralentir et l’inflation tomber en deçà des objectifs. L’impact de la monnaie sur l’économie pourrait être renforcé dans un contexte de tensions commerciales mondiales, a mentionné l’institution, ajoutant qu’elle évaluerait si des mesures supplémentaires devenaient nécessaires pour contenir le baht.
Une baisse des taux probablement insuffisante
Sunthorn Thongthip, économiste à Kasikornbank, a déclaré que les secteurs qui bénéficieront le plus de cette diminution sont l’immobilier, les infrastructures, les services et les petits établissements financiers, tandis que les grandes banques pourraient être affectées de façon négative.
« Cette baisse pourrait ne pas suffire à vraiment améliorer les perspectives pour les exportations », a-t-il ajouté.
Le nouveau gouvernement thaïlandais, qui a pris ses fonctions en juillet, souhaite que les politiques budgétaires et monétaires soient harmonisées afin de protéger l’économie des tensions commerciales.
« Cela devrait atténuer une partie de la pression, que la banque centrale tentait de contrer par d’autres mesures qui se sont avérées inefficaces », a déclaré Prakash Sakpal, économiste à Singapour chez ING Groep, qui prévoit une nouvelle baisse d’un quart de point cette année. « Ce n’est pas uniquement nécessaire pour stopper l’appréciation de la monnaie, mais aussi pour un meilleur équilibre politique, étant donné qu’il n’y a pas encore de clarté sur la relance budgétaire. »
Frances Cheung, responsable de la stratégie macroéconomique pour l’Asie chez Westpac Banking à Singapour, a déclaré que le taux directeur réel de la Thaïlande reste relativement bas. La banque centrale « prendra probablement le temps d’évaluer les résultats avant d’envisager la prochaine étape », a-t-elle estimé.